Alexandre Dumas
Les Trois Mousquetaires (1844)
"Les trois mousquetaires"
est - à l'instar de "Notre
Dame de Paris"
ou "Les misérables"
- une oeuvre que tout le monde
connaît, au delà
même de nos frontières,
grâce aux adaptations diverses,
théâtrales ou cinématographiques
et au fait que quelqu'un a décidé,
un jour, que c'était génial.
Personne n'a lu ces romans, bien
sûr, mais tout le monde
les connaît et quiconque
pourrait même vous citer
la sainte trinité dans
l'ordre : Athos, Porthos et Aramis.
Vous imaginez la gueule de Dumas
s'il savait qu'en 2023, la planète
quasi entière - et ce,
jusqu'au plus analphabète
- peut lui citer le nom de ses
personnages et qu'une référence
à son roman est récurrente
dans le long métrage qui
a remporté l'Oscar du meilleur
film ? Il se dirait sans doute
: "Ça, Alexandre,
c'est la classe !"
"Les trois mousquetaires"
est un roman en deux parties :
d'Artagnan et Milady. La première
constitue un tiers du texte. Elle
est construite autour de d'Artagnan
(donc), l'impétueux gascon,
qui monte à Paris pour
y trouver la gloire sur son cheval
jaune. Après une mise en
contexte et une rapide présentation
des personnages se déroule
la fameuse histoire des ferrets.
Tout ceci relève du roman
de cape et d'épées
pour adolescents avides d'aventures.
Les personnages - s'ils possèdent
quelques traits de caractères
- sont peu fouillés et
se contentent de parler et d'agir.
Ils disent "faisons ceci"
et le font. De plus, les héros
semblent évoluer dans un
monde où vit seulement
une dizaine de personnes. Ils
habitent Paris, voyagent sur les
routes de France jusqu'en Angleterre
et ne croisent que quatre ou cinq
bonhommes, toujours les mêmes.
Décidemment, la vie était
simple pour les mousquetaires
de Louis XIII.
Puis vient la seconde partie dans
laquelle l'ambiance se dégrade
au fil des pages. Dès le
chapitre 26 ("le pavillon"),
on sent - via Milady - qu'une
menace plane alors que les mousquetaires
étaient jusque là
invincibles. Dumas se met à
présenter ses personnages
- après 360 pages de roman
- et évoque la religion
d'Aramis, le secret d'Athos, la
mystérieuse duchesse de
Porthos. Quant à d'Artagnan
- pourtant impeccable jusque là
- il se met à fricoter
avec une soubrette et avec Milady,
faisant fi de Constance Bonacieux.
Après 400 pages, les enfants
sont couchés, au diable
les valeurs chevaleresques !
Les mousquetaires partent ensuite
pour la Rochelle afin de corriger
les Huguenots et - de façon
fort originale - le lecteur médusé
constate un glissement des personnages
centraux. Le roi disparait, M.
de Treville, Anne d'Autriche,
le couple Bonacieux itou. Même
d'Artagnan tend à s'effacer
et, petit à petit, Milady
de Winter s'impose comme étant
la figure centrale avec son voyage
en Angleterre et quelques passages
longuets de séduction (cinquante
pages...). Quant aux mousquetaires,
Athos en devient le chef. Et tout
ceci se termine dans un maelstrom
de complots, de trahisons et de
morts atroces.
Quand on sort du jovial récit
des ferrets d'Anne d'Autriche
pour tomber dans ce final, vous
reconnaitrez que si nous ne sommes
pas chez Flaubert, nous ne sommes
plus vraiment dans un récit
d'aventures pour ados innocents.
Avec 952 pages lues (en 8 jours
de lecture, hors transports en
commun), je me dis que l'inspiration
fut bonne. A présent je
vais tenter de maintenir ce rythme
avec "Critique de la raison
pure" de Kant.
PS
: Pour l'anecdote, la devise "Tous
pour un, un pour tous", que
nous aurions pu décemment
attendre à tous les coins
de chapitre, n'est finalement
citée qu'une seule fois
sur 950 pages.
|
_____________________________________________________________________________
LA
CHRONiQUE D'UN AUTRE BOUQUiN
_____________________________________________________________________________
|
Dieu,
Shakespeare
Et Moi
Woody
Allen
...
un personnage
à facettes
! ...
|
|
|