À
Nous Quatre, Cardinal!
André Hunebelle (1974)
"À
nous quatre, cardinal!" est
un film que c'est pas rien.
L’histoire, elle se tient,
t’as quatre gus qui veulent
récupérer les ferrets
de la reine, prononcer : lè
fèwré deu la wrène.
Cerise sur le gâteau, ça
se passe souvent outre-Channel (comme
le dit fort bien un des personnages).
Et dans ces lieux inamicaux des
mecs qui causent avec un drôle
d'accent pointu veulent pendre haut
et court nos héros (ils sont
quatre).
Et s'en suit une scène interminablement
désopilante avec Buckingham
(c'est celui qu'a les ferrets) qui
cause en français avec un
accent pourri à des Brittons
qui semblent le comprendre et tout
ça dans une drôlerie
sans nom, même qu’à
côté "Spinal
tap", c’est
du Bresson.
Et sur des dialogues de Prévert
et une
musique de Cosma, nos quatre nazes
tentent vaille que vaille de ramener
les fèwré à
la queen du 13, un sympathique roi
pas forcément superstitieux
qui bottait le cul du Cardinal dans
le premier round (voir ICI...
enfin, c'est peut-être pas
obligé).
On y trouve l'inénarrable
Haller (déjà au top
ICI)
qui confie à l’acteur
préféré des
Charlots - un chauve dont j'ai oublié
le nom, désolé -,
le rôle du gars qui fait super
rire, surtout dans les scènes
inoubliables du cheval et surtout
celle de Lady Marmelade... ou de
Winter, je ne sais plus, qui fait
du cheval (justement) sur son dos
parmi une flopée de bretteurs
du cardinal huileux à qui
mieux mieux, le tout tellement hilarant
qu'à côté "Ace
Ventura en Afrique" avec Jim
Carrey c’est "Le dialogue
des Carmélites".
Bref, entrecoupé de scènes
irrésistibles à grand
renfort de duels épiques
à l'épée pleins
d’huile d’olive et d'une
chiée de gardes tout noirs
du Cardinal, ce film parsemé
de dialogues qui font réfléchir
est devenu totalement culte. Un
petit extrait de l'un d'entre eux
si tu veux bien :
- On était pas trois
?
- Non, on a toujours été
quatre.
- Ah bon ?
A part ça, j'ai rarement
vu autant de gus innocents se prendre
des chiées de roustes
tout du long. Bon d'accord, ce sont
essentiellement des gardes du Cardinal,
mais tout de même.
Mais le moment le plus exaltant
de ce film se trouve vers la fin
(on a bien fait de rester jusque
là) avec l'apparition de
Paul "Je faisais que passer
et j'ai vu de l'animation"
Préboist qui chut malencontreusement
dans une crevasse du scénario
de Prévert. On pense à
Michel Leeb dans "On
l'appelle Catastrophe"
mais en plus fendard, ou à
Brigitte Lahaie dans "La fiancée
de Dracula" mais en moins chevelu.
Puis le Paul disparait brutalement
du film pour aller faire son numéro
dans "Le plumard en folie"
ratant de peu dans un rôle
de composition le prix d’interprétation
au festival du film d'auteur de
Marvejols 1975.
Heureusement, après une ultime
péripétie (Bernad
Haller, le cardinal, se fait griffer
par son chat), tout se termine dans
une déchetterie, l'auteur
ayant voulu nous faire comprendre
que ce lieu est en quelque sorte
comme la métaphore de l'oeuvre.
Esthétiquement, le film évoque
tour à tour "Le Führer
en folie" et "Drôles
de Zèbres", en moins
avant-gardistes. Et comparé
à "À nous quatre,
Cardinal!", "Lion
man", c’est
"Conan
le Barbare".
Quelques
clés pour mieux comprendre
cette oeuvre plutôt complexe
:
• Pressenti pour jouer D’artagnan,
Robert Redford aurait accepté
s’il n’y avait eu qu’un
seul mousquetaire.
• "Drôles de zèbres"
: film français qui abordait
la philosophie husserlienne, de
façon husserlienne.
• Jim Carrey : surtout connu
pour avoir un jour repris "I
am the walrus" d'un des quatre
de Liverpool... Je
t'en chante un passage si tu veux
?
-
NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON
!!
- Bon, d'accord.
• "Le Führer en
folie" : fut
une comédie de l'indicible
Philippe Clair qui commit entre
autres chef-d'oeuvres l'impayable
"Par où t'es rentré
? On t'a pas vu sortir" dont
tu peux lire la chronique la plus
drôle du monde ICI.
• Bernard Haller :
célèbre acteur
français (enfin, suisse),
on lui doit une superbe création
dans le très culte "Signé
Furax" où figurait aussi
l'incontournable Paul Préboist
dont on peut apprendre un peu plus
trois lignes en dessous.
• Marvejols : commune de Margeride...
ou Gévandan, difficile à
dire car personne n'a jamais réussi
à y aller.
• Paul Préboist :
faillit avoir aussi le prix d'interprétation
à Cannes pour son rôle
tout en émotion dans "Les
fous du stade".
On lui préféra un
acteur japonais resté inconnu
pour son rôle muet dans un
film tout en non-dits sur l'emmerdante
vie d'un poubelleur seul et taciturne
qui écoutait en boucle une
vieille cassette de Lou Reed dans
sa camionnette étroite et
tout en hauteur.
• Arnold Schwarzenegger :
on peut le reconnaître
alors dans sa première apparition
à l'écran grâce
à sa musculature bien plus
avantageuse que celle des autres
figurants parmi la vingtaine de
gardes du Cardinal qui chutent dans
l'escalier de l'auberge.
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