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Yannick Noah
L'interview


Ne reculant devant aucun sacrifice, j'ai rencontré le beau et sémillant Yannick Noah. Ca s'est passé l'autre jour à Roland Garros pour l'ouverture du grand concours annuel de cours-et-renvoie-la-ba-balle. Après avoir traversé les gradins du court Maurice Mauresmo, je suis passé devant Jean-Paul Belmondo et son Kiki qui regardaient le 7° de finale simple mixte qui opposait le franco-islandais Marcel Gustavsson à la russe Olga Supernova - cette dernière ayant quatre balles de 7 jeux à 2 dans le 8° set. Puis je suis enfin arrivé devant le grand Yannick Noah qui lançait des autographes à la volée.

 

Yannick, comment avez-vous débuté dans le monde implacablement impitoyable de la chansonnette où le premier service n'est pas forcément gagnant ?
J'avais formé un duo avec Becker.

Le metteur en scène ?
Non. L'autre, le teuton qui avait gagné le tournoi vert et mauve sur prairie à Wimbledon. On s'appelait Black & Becker. C'était pas du bricolage mais, comme le Boris il chantait à peine mieux qu'une raquette sans cordes, j'ai continué seul.

J'ai lu quelque part que vous avez été un temps préparateur psychologique pour le PSG lors d'une finale d'une coupe européenne. En quoi ça consistait ?
Il s'agissait de faire quarante fois le tour du terrain, serrés les uns derrière les autres - l'équipe, le staff technique, le gardien du stade, les femmes des joueurs et le jardinier qui rafistole les mottes -, tout en sautant et chantant :

Saga Africa
Ambiance de la brousse
Saga Africa
Attention les secousses...


Ca a marché ?
Oui. On a même remporté la finale de la coupe de ceux qui avaient gagné la coupe. Mais, le plus positif a été que quelque part ça a resserré les liens et provoqué un rapprochement certain du groupe. L'important c'est le collectif comme le disait Aimé.

L'écrivain ?
Non. L'autre, celui portait les citrons aux champions du monde en 98.

Je me suis laissé dire que vous avez gagné à Roland Garros il y a une trentaine d'années, c'est une blague, Yannick ?
Pas du tout. Mais je l'ai pas vraiment fait exprès, rassure-toi.

Comment ça ?
Je jouais contre un scandinave dont j'ai oublié le nom. C'est si vieux tout ça. Et le temps, c'est comme la première ba-balle de service, ça passe trop vite comme le disait le basque bondissant.

Lizarazu ?
Non. L'autre qui jouait toujours en pantalon.

Ah bon ? Pourquoi ?
Sans doute qu'il avait peur de se geler. Faut quand même savoir qu'à son époque, il faisait nettement moins chaud qu'aujourd'hui. La terre avait plutôt tendance à se refroidir.

Et cette finale, Yannick ?
Donc, le mec qui me renvoyait la ba-balle était hyper fair-play. Chaque fois que je mettais la balle dehors, il disait au mec assis sur la chaise haute que la balle était en fait bonne. Conclusion : on me redonnait chaque fois deux balles. J'ai fini par gagner après quatre bonnes heures de jeu en 7 sets, 6-4, 6-4, 6-4, 6-4, 6-4, 6-4 et, euh... 6-4. C'était épuisant, surtout pour les spectateurs.

Yannick, peut-on dire que vous êtes un tennisman qui chante ou bien un chanteur qui joue au tennis ?
Ni l'un ni l'autre. En fait je me considère comme un mec qui essaie de chanter. Et qui, en plus, est deuxième au hit-parade juste derrière des artistes comme Crazy Frog qui sont moins bien classés que moi à l'ATP.

N'y a t-il pas, Yannick, un parallèle entre le court de tennis et la scène d'un music-hall ?
Pas vraiment. Un adversaire c'est sûrement moins mauvais que le public. En plus, l'adversaire t'envoie qu'une balle à la fois. Il est sport. Un public, c'est plus vicieux. Il peut te balancer plein de tomates, d'un coup. En plus ça peut salir mon super tee-shirt Bob Marley. C'est con un public.

Ah bon ?
Oui. Mais heureusement que j'ai du succès. Tout le monde m'aime. Du coup le public est moins con.

Comment expliquez-vous, Yannick, que vous ayez un tel succès ?
Ca vient en fait de la chaleur que dégagent mes chansons. D'ailleurs, c'est pour ça que je continue de jouer en short malgré mon âge avancé.

A propos de Marley, n'êtes-vous pas en quelque sorte son fils spirituel, quelque part ?
Spirituel ? Sûrement. Je connais plein de gens qui se sont marrés à l'écoute de mes chansons. En plus, mon oeuvre, telle l'astre du jour dardant ses rayons bienfaiteurs sur la grisaille du quotidien peut amener comme un léger sourire sur les lèvres gercées de la RMIste qui du coup oublie un peu le prix de mon cd.

Yannick, on vous dit trop gentil, qu'en pensez-vous ?
C'est vrai et c'est pour ça d'ailleurs que j'ai pas gagné tous les tournois que j'aurai dû. Moi, j'ai plein de vibrations positives et un super karma. Je veux le bonheur de tous. Ah, si tous les gens du monde pouvaient se donner la main pour aller acheter mes disques !

Yannick, d'aucuns vous reprochent d’avoir une vision un peu primaire du monde.
C'est exact. Je trouve personnellement que la guerre c'est hyper laid. Tous ces gens qui se massacrent alors qu'ils pourraient tout aussi bien se retrouver venant ambiancer, ambiance soukouss, ambiance makossa dans la même communion à mes shows. Quel gachis.

C'est vrai.
En plus, je trouve que l'amour c'est hyper beau. Mais il m'est arrivé quand je fêtais la victoire, ambiance du bikutsi, ambiance assiko avec les joueurs du PSG de penser le contraire. Quant à ma soi-disant vision primaire, je répondrai en reprenant la voix des sages : "No more fighting, no more killing".

C'est fort.
Je te le fais pas dire, brother.

Quels sont vos projets, Yannick ?
En ce moment je travaille à un concept-album à propos de ma brillante carrière de tennisman. J'ai pas encore bien réfléchi au titre mais ça s'appellera quelque chose comme "Putain, ça salit la terre battue". Il y aura autant de chansons que de victoires. En fait ce sera un cd 2 titres.

Et là, tout de suite ?
Je participe au simple mixte vétéran. Je vais jouer sur le court Suzanne Lenglen. Bien que je me demande si elle pratique encore.

Suzanne Lenglen est sûrement le nom du court comme on aurait pu dire : "jouer sur le court René Lacoste".
Ca m'étonnerait.

Pourquoi donc ?
Parce qu'il est mort.

Bon, alors bonne chance Yannick pour votre match... Je vais venir vous voir jouer avec plaisir.
C'est ton partenaire de double ?

 

Alors j'ai quitté le grand Yannick Noah. Comme je retraversais les gradins, je repassai devant Belmondo et son Kiki. Etant un ami de la gente canine, je voulus caresser ce chien microscopique et dégueulasse. Soudain, alors que je passai ma main gentiment sur son crâne sale et plein de poils, Kiki se jeta sur moi pour me mordre. J'eus le réflexe d'attraper une raquette qui traînait par là. Je la lançai sur l'animal qui sauta des avant-bras de son maître pour courir sur le cour où Olga Supernova, tous biceps dehors venait de gagner le 9° set sur le score de 12 à 6. Pendant ce temps, mon coup peu précis projeta la raquette sur la tête de la vieille gloire du cinéma français. Les cordes cassèrent et la raquette finit sa course autour du cou de Belmondo. Après quelques instants, ayant repris ses esprits, il récupéra son Kiki qui venait de pisser sur le pied de la chaise haute du mec qui gueulait dans le micro. Alors l'ancien héros de Borsalino abandonna la rencontre sur incident technique au début de la 10° manche.

 

Les joueurs du PSG se préparant psychologiquement pour la finale de la coupe de ceux qui ont gagné la coupe.