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CHRONiQUES MUSiCALES

AUtRES

Avec des personnages
sans ambiguïté

Luis Vélez De Guevara
Régner Après La Mort (1635)


"Reinar después de morir", comme on dit dans la langue du docteur Fuentes (d'où l'adage cycliste : il ne faut pas dire : Fuentes, je ne boirai jamais de ton eau), est la pièce principale de l'oeuvre théâtrale de Vélez de Guevara. Ce dernier, comme bien des auteurs du siècle d'or espagnol, brille par son anonymat et malgré un succès honorable en son temps, est, à l'instar d'un Juan Ruiz de Alarcón y Mendoza, voire d'un Guillén de Castro y Bellvis (je n'invente pas les noms), un auteur dont JAMAIS PERSONNE n'a entendu parler. "RALM" est une des deux pièces proposées à Montherlant avant qu'il écrive "La reine morte". L'histoire y est également celle d'Inés de Castro Cuello de Garza (elle avait un long cou) qui a fricoté avec le prince Pedro, ce qui empêche un mariage de ce dernier avec l'infante de Navarre, au grand dam du roi Alonso (Ferrante chez Montherlant).

L'intérêt était pour moi de voir ce que Montherlant avait fait de cette histoire simpliste et un peu débile. Eh bien il en a fait... du Montherlant. La pièce de Vélez de Guevara est un peu naze, je ne vous le cache pas. Elle ressemble aux mauvaises de Vincento Gil ou de Cervantes, comme "Le ruffian bienheureux", c'est à dire pleurnicharde avec des dialogues redondants. Dans "Régner après...", les personnages ont peu de psychologie et aucune ambiguïté alors que ceux de Montherlant ne sont que mal-être. Montherlant crée une tension qui n'existe pas chez Vélez de Guevara parce que Ferrante n'est pas Alonso et d'ailleurs, Montherlant a changé le nom du personnage. De plus, l'infante est d'une froideur magistrale mais sans être foncièrement méchante chez Montherlant et elle est juste très méchante chez Vélez. Ce statut de l'infante change le dénouement de l'histoire puisque tuer la reine n'a pas le même sens lorsque c'est sous la pression de l'infante ou sans cette pression.

Bref, "Régner après..." se laisse lire, ne m'écoutez pas, je ne fais rien qu'à me moquer ! Elle est juste dénuée de cette modernité qui caractérise d'autres auteurs antédiluviens comme, disons, Shakespeare. Me concernant, c'était une étape supplémentaire dans mes lectures sur Inés de Castro. J'ai même pensé prendre un livre qui lui était entièrement consacré mais que je n'aurais malheureusement pas pu lire parce qu'en portugais.