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CHRONiQUES MUSiCALES

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Eut le Goncourt

Michel Tournier
Le roi des aulnes (1970)


"Le roi des aulnes" est un autre roman fendard. C'est vrai, y'en a beaucoup. Mais celui-ci l'est peut-être plus que les autres. D'ailleurs il reçut pour cela le Goncourt en 1970, une fort belle année dont on se souvient qu'elle fut en plus d'être celle de ce beau bouquin de Tournier celle d'une éternelle chanson de Sacha Distel dont le titre était "Toute la pluie tombe sur moi", en ces temps il pleuvait beaucoup, surtout sur lui, pas de bol.

Ce livre tant il a des qualités fut vendu à plus de quatre millions d'exemplaires, nettement plus que "Comment réussir à vendre un bouquin de merde" de l'essayiste marseillais César Garlaban. C'est sûr que le titre l'a pas trop aidé.

Maintenant je te raconte l'histoire complète car je sais que pas con, t'iras pas lire ce bouquin.

Donc on a la super vie d'un gars un peu demeuré, naze et solitaire, ça se comprend. Comme il est pas gâté par la nature, du coup, il vit par procuration, s'invente plein de trucs délirants à partir d'autres (aussi délirants) pris dans quelques mythes anciens. Enfin, un truc de taré.

L'auteur qui maitrise la chose superbement, c'est Tournier, un écrivain connu aussi pour "Vendredi ou les limbes du Pacifique" un autre superbe bouquin qui se passe un vendredi dans... euh... le Pacifique, mais, bon, comme y'a bien longtemps que je l'ai lu, je peux me tromper, j'y retourne dès que possible, l'auteur, dis-je (j'espère que tu te perds pas dans cette putain de phrase (en ce moment je lis beaucoup Proust, ceci expliquant sûrement cela)), bref, re-dis-je, Tournier raconte tout ce qui arrive de génial au non-héros et donne la vision du même non-héros, il s'appelle Abel.

Et c'est quoi ces événements ? Eh bien, on a droit au temps de pensionnat du gars où ça craint un peu et où c'est pas forcément Disneyland. Et puis, Abel devient un peu moins jeune comme dans la vie et a une attirance pas forcément explicitée pour les enfants mais, bon, voici qu'arrive la guerre de 39 qui ne m'a pas tout à fait déçu, elle fut longue et massacrante et je ne crache pas dessus...

Du coup, ça arrange Abel, on passe à autre chose et notre gars devient bien sûr un soldat nullo dans un régiment, nullo aussi. Alors il est fait prisonnier et envoyé loin là-bas en Allemagne, peut-être plus loin même. Et ce dépaysement transforme notre personnage. On le met au boulot sur les terres d'un sale type sanguinaire nommé Göring, t'as dû sûrement en entendre parler.

Puis, comme par hasard, il se retrouve dans un camp en contact avec des jeunes nazis. Et, comme c'est la débacle, les adultes du camp s'en vont sur le front et notre Abel (enfin, le sien) reste seul avec une centaine de pré-ados mais, les bolcheviques arrivent le couteau entre les dents, si l'on peut dire, et font tout péter. Tout le monde est tué... sauf Abel, faut ça.

Mais bon, il découvre les horreurs des camps de concentration, fuit avec un enfant juif sur ses épaules comme le roi des aulnes jadis ogre voleur d'enfants justement et s'en va plus loin près d'une forêt... d'aulnes bien sûr.

Bref, avec en bonus quelques superbes divagations mythologico-psychologiques vaseuses et de charmants arrêts sur des paysages désolés, je me suis particulièrement amusé.

Du coup je trouve que Tournier avait bien mérité le Goncourt.