Jadis,
les Roxy Music faisaient la une
des revues branchées. Ils
proposaient un glam-rock pop prog
pas trop mauvais (du moins jusqu'à
cet album). "Rock décadent"
osèrent même affirmer
certains, le plus sérieusement
du monde.
On avait d'abord un chanteur de
banlieue (déjà ringard
à l'époque) qui
se prenait pour le King de Memphis,
tout en se baladant, les cheveux
gominés et avec un costard
d'extra pour banquet à
peine moins marrant que celui
du Glitter (l'autre clown du glam-rock
de l'époque). Ferry qu'il
s'appelle, ce chanteur qui, en
outre, a composé tous les
thèmes. Et pas brillant
pour un sou. Et avec une voix
naviguant entre du Bowie période
"Hunky dory" et un Reed
de série qui aurait attrapé
mal à la gorge un soir
de pluie quelque part entre Broadway
et Greenwich Village. Le tout
réellement ridicule et
dégageant autant de feeling
qu'une bite d'amarrage sur un
port breton. De quoi faire fuir
les plus coriaces.
On trouvait aussi cet anti-musicien
nommé Eno qui - avant de
ressembler à l'Albert l'héritier
du rocher - avait encore des cheveux
et se la jouait fond de teint,
rimel, rouges à lèvres
et plumes un peu partout. Il n'était
sûrement pas pour rien dans
l'aspect expérimental de
l'album. (Au niveau musical bien
sûr. Pas dans son look.
Je vois que tu suis.)
Quand ils ne chantaient pas des
grosses bouses comme "Do
the strand", "The bogus
man" ou "Editions of
you" les marrants Roxy Music
essayaient de se lancer dans quelques
interventions répétitives
et lancinantes qui me rappellent
étrangement le groupe allemand
Can qui faisait un peu la même
chose deux ans auparavant. Tiens,
tiens. Mais les Can qui ne se
maquillaient pas et ne se baladaient
pas en costard-cravates n'ont
pas eu le même succès.
Le look, c'est important. Et les
pochettes kitschissimes aussi
(ici avec Amanda Lear, pintade
peinturlurée, ex-égérie
du mauvais goût télévisuel).
Parfois Phil Manzanera lançait
quelques accords à la gratte
électrique (mais pas trop).
Et le sax tourmenté d'Andy
McKay s'épanchait comme
dans "In every dream home
a heartache" ou "For
your pleasure" où
le groupe, bien que sans grande
invention, avait, malgré
tout, un certain attrait.
Tout cela permet donc sûrement
de supporter encore aujourd'hui
quelques passages de cet album
alors que ceux des Bowie glam-rockeurs
et consorts de l'époque
ont plutôt bigrement vieilli.
En conséquence, si l'on
pouvait enlever ce chanteur assez
insupportable, on aurait donc
un album de pop-rock-prog avec
deux ou trois titres acceptables.