Georges peint des devantures de cinéma. Il est sans le sou et loge dans un appartement minable. Georges passe son temps au pied du monument aux morts de la gare Saint Lazare à observer les voyageurs s'en allant pour la banlieue ouest de Paris, notamment à Chatou, le centre de l'univers, avec sa célèbre foire à la brocante et aux jambons. Un jour, en allant au ciné, il rencontre Yolande (impossibilité n°1), elle entre dans son jeu (impossibilité n°2) même si elle est mariée (n°3), a des enfants (n°4), est plus âgée que lui (n°5), est riche alors que lui est pauvre (n°6). N'en jette plus ! me diriez-vous peut-être à cet instant précis. Mais lorsque vous saurez qu'après (surlignez pour découvrir les impossibilités suivantes qui révèlent l'intrigue)lui avoir posé un lapin, Yolande lui fait glisser un message d'excuses sous la porte (n°7) et le lendemain, sans crier gare, débarque chez lui (n°8) en disant qu'elle a sa nuit (n°9) avant de se faire prendre "comme une chienne" sur un bateau, sur les quais de l'île Saint Louis (n°10) et que Georges a également un ticket avec une hongroise super bien gaulée (n°11) et... d'accord, très bien, vous avez compris.

"Les pas perdus" a une double construction contradictoire. L'univers est absolument crédible : le Paris des années 50, la gare Saint Lazare, le quartier environnant. Fallet cite même les trajets des trains de banlieues. Mais dans cet univers vraisemblable, la romance n'a pas une once de crédibilité, même en admettant que Georges est un homme définitivement chanceux en amour (ce qu'il n'est d'ailleurs pas). Alors évidemment, Fallet a un style chatoyant et se lit très bien. Les remarques de son personnage principal, célibataire viril qui méprise un poil les vies rangées, sont cyniques et amusantes. Mais cette histoire d'amour que j'ai trouvé invraisemblable m'a décontenancé.