ACCUEiL

DiSQUES

CHRONiQUES MUSiCALES

AUtRES

Nick Mason
L'interview


Ne reculant devant aucun sacrifice, j'ai rencontré le beau et sémillant Nick Mason, sympathique musicien qui fut jadis membre du groupe Pink Floyd même si personne ne le sait et que tout le monde s'en fout. Ca c'est passé l'autre jour dans la plus proche grande épicerie à cds de mon domicile. Comme depuis des heures aucun client ne s'approchait de son stand où il plantait près d'une pile d'exemplaires de son nouveau livre nommé "Un jour j'ai fait partie de Pink Floyd", Nick Mason a bien voulu répondre gentiment à mes questions.


Nick, on a l'impression, à vous voir que, malgré le succès immense de Pink Floyd, vous êtes quelque part resté celui que vous étiez à vos débuts... en plus vieux.

C'est vrai. Les ans n'ont pas entamé cette modestie qui faisait tout mon charme derrière ma batterie et sous les lasers. Je suis resté très simple en fin de compte. Je vous donne un exemple ?

Je vous en prie.
Eh bien, quand je rencontre Syd Barrett, une fois tous les vingt ans, j'accepte encore qu'il me tutoie alors que moi je gagne toujours autant de dollars pendant que lui gagne même plus à être connu.

Alors comme ça, Nick, il paraît que vous avez fait partie de Pink Floyd ?
Parfaitement. Mais je l'ai pas fait exprès.

Ah bon ? Comment ça ?
Eh bien, un jour en 66 comme j'allais m'envoyer une bonne bière au pub du quartier tout en écoutant sur le juke-box un bon 45 tours de rythm'n'blues, j'ai croisé Richard. Il m'a demandé si je savais jouer de la batterie car avec Roger, ils avaient besoin d'un batteur pour former un groupe de rock.

Et alors ?
Je lui ai dit que j'avais un peu joué pendant au moins une semaine d'un tambour que j'avais eu pour le Noël de mes six ans. Mais il avait fini aux bordilles assez rapidement vu que ça emmerdait tout le monde dans le quartier. Richard m' a répondu : "C'est bon, ça fera l'affaire !" Alors le groupe est né.

Parlez-nous un peu de votre livre, Nick.
Eh bien il coûte une cinquantaine d'euros.

Mais encore ?
C'est un gros bouquin avec une belle pochette en couleur sur laquelle Pink Floyd est écrit en gros. A l'intérieur il y a beaucoup de photos et du texte dont auquel c'est moi que je l'ai écrit avec plein de consonnes et de voyelles.

Comment peut-on définir votre style ?
Tee-shirt et cheveux courts. Très Floyd troisième millénaire. Avec en plus une légère rondeur un rien psychédélique à peine perceptible au niveau de l'estomac.

Quelqu'un dont j'ai oublié le nom a dit : "écrire c'est flotter dans le vide." Ca vous inspire quoi ?
Faites-lui savoir qu'il fait comme il veut. Moi, comme je suis plutôt sujet au vertige, mon truc c'est le bon fauteuil bien confortable dans mon bureau, les pieds dans mes charentaises préférées.

Avez-vous eu l'angoisse de la feuille blanche ?
Pas vraiment. ce serait plutôt celle de la couverture.

Comment ça ?
Je me suis longtemps demandé si je devais y mettre ma photo. Puis on m'a fait comprendre qu'il valait mieux y mettre autre chose.

Vous avez bien fait.
Oui. Et finalement on a mis ce miroir et ces pierres à la con.

Vous y racontez quoi d'autre comme scoop dans votre bouquin à part le fait que vous faisiez partie du groupe ?
Quelques anecdotes super intéressantes. On y apprend même le nom de la vache sur la pochette d' "Atom heart mother".

C'est passionnant en effet.
Vous m'achetez un livre ?

Non.
Deux ?

Roger Waters a affirmé que vous êtes nul à la batterie. Qu'en pensez-vous ?
Vous savez, le Roger, il est pas forcément facile à vivre.

On entend dire un peu partout qu'il a un caractère de cochon.
C'est sûr que j'ai même connu des musiciens de black-metal qui avaient un sens de l'humour plus affûté. Roger s'emporte pour des broutilles. D'ailleurs un jour de colère il a même dit qu'il était le meilleur à la basse. C'est vous dire. C'est pas pour rien qu'on l'appelle "trouble waters". Mais faut savoir l'apprivoiser. Dites lui qu'il est le plus grand artiste du siècle et il peut devenir un agréable camarade. Mais je sais pourquoi il a dit ça sur moi.

Ah bon ? Pourquoi ?
Eh bien, c'est simple. Quand on jouait "The wall" sur scène, y avait un mur. Roger voulait qu'on soit tous les trois derrière le mur et lui devant. Bon, c'est vrai qu'il faisait presque tout dans le groupe mais là il exagérait un peu et faut savoir que quand même on était aussi un peu Pink Floyd.

En effet.
Alors, j'ai dit que, dans ces conditions, on pourrait difficilement m'entendre et qu'en plus, si j'étais pas devant au pied du mur on ne me verrait pas.

Ca me paraît logique.
D'autant plus que tout le monde sait que c'est au pied du mur qu'on voit le Mason.

C'est vrai.
Donc, il s'est faché et comme chaque fois qu'il se mettait en colère il a dit n'importe quoi.

N'avez-vous jamais eu envie de faire un jour un album super perso Nick ?
Supersonique ?

Non, solo.
Oui bien sûr comme tout le monde. Et je peux même vous avouer un truc.

Ah oui, lequel ?
Eh bien, j'en ai fait un.

Pas possible !
Si, je vous assure.

Ca a marché ?
Pas vraiment.

Pourquoi ça ?
Ils avaient oublié d'écrire Pink Floyd dessus.

En effet c'est un handicap.
Je vous le fais pas dire.

J'ai lu quelque part que vous avez composé des trucs pour Pink Floyd. Dites-moi, Nick, c'est une blague ?
Pas du tout. J'ai même fait dans le temps un super truc pour "Ummagumma".

Ah bon ?
Parfaitement. Et si je l'avais pas composé on aurait pas pu proposer un double album. C'est pas rien ça.

Qu'y faisiez-vous ?
J'y tapais de façon assez inspirée sur les caisses de ma batterie et même sur des cymbales.

C'est assez original.
En effet.

Vous n'avez pas composé autre chose au moins ?
Si. Même avec un certain talent, faut bien le reconnaître. Et en plus tout seul.

C'était quoi ?
Un super truc pour "Dark side of the moon" dont je ne suis pas peu fier.

De "Dark side of the moon" ?
Non. De ma composition.

Ca s'appelait comment ?
"Speak to me". D'ailleurs il a beaucoup fait pour la renommée du disque.

Nick, pouvez-vous définir votre pote David Gilmour en quelques mots ?
Combien ?

Euh... Cinq.
Le temps est sans pitié.

Que pensez-vous de la carrière solo de Roger Waters ?
J'avoue n'avoir pas trop eu le temps de l'écouter. Disons que je n'aime pas trop son nouveau style metal-folk celte, enfin je crois. Après ça qu'on ne s'étonne pas que les ventes de disques baissent.

Comment expliquez-vous, Nick, que le groupe se soit séparé ?
C'est à cause du mur. Avec ce truc toujours entre nous on a eu du mal à communiquer. Chacun égaré derrière toutes ces putains de briques le groupe avait perdu de son âme. J'avais beau gueuler : " Is There Anybody Out There ?" Y avait rien à faire.

Pensez-vous, Nick, à l'instar de Robinson Crusoé que la solitude c'est pire quand on est seul ?
C'est sûr. Surtout quand tu vois personne derrière tes parpaings.

Quels sont vos projets Nick, une fois la promotion de votre bouquin terminée ?
Je vais sans doute me payer le premier modèle de la Renault Juvaquatre. Je l'ai pas encore dans ma collection. J'en ai vu une en venant, pas loin d'ici dans une casse. Elle est un peu amochée d'accord mais retapée elle sera superbe.

D'où vous est venue, mon cher Nick, cette passion dévorante pour les voitures et le sport automobile en général ?
Il faut savoir que très jeune, avec mon père nous partions joyeux vers des courses lointaines sur les bucoliques routes de mon pays natal. Mon père avait une deuch mauve avec plein de jolis petits cochons roses dessus. Ah, ces odeurs d'essence ! Et l'huile chaude ! C'est toute mon enfance !

Je vous sens ému, là, Nick ?
Je veux oui. En plus y avait le bruit envoûtant de la dilatation du métal brûlant. C'est à ce moment-là, dans le vent, l'eau de pluie dégoulinant dans mes cheveux d'enfant émerveillé et les narines gonflées de toutes ces senteurs enivrantes que j'ai eu la vocation de devenir coureur automobile. Mais malheureusement ce ne fut pas possible.

Pourquoi donc ?
On fait pas toujours ce qu'on veut dans la vie. Y a eu aussi Pink Floyd.

Vous avez commencé avec quelle voiture ?
C'était une Juvaquatre justement. Comme elle tombait souvent en panne, ça m'a permis d'apprendre le dur boulot de la mécanique. Mon rêve ça a toujours été quelque part de tenir un garage dans mon patelin. "Chez Nick, le roi du cric". Ca aurait été super comme nom, non ?

Non. Mais, qu'aimez-vous donc, mon cher Nick, dans le dur microcosme des courses comme qui dirait automobiles entre boucan assourdissant et pollution ?
J'y aime cette âpre et incessante lutte entre le fier pilote agrippé à son volant et la voiture rebelle vombrissant sur l'asphalte brûlant.

C'est beau, Nick.
En effet. Seul dans son cockpit, on y est bien. Et c'est pas comme dans Pink Floyd où on faisait rien qu'à m'emmerder. Waters surtout. J'aime aussi cette fraternité des stands. Faut savoir que le monde des courses automobiles c'est aussi un espace de convivialité virile mais correcte. Il y règne une chaude ambiance faite de bruit et de cambouis où autant de corps musculeux se frôlent dans des combinaisons graisseuses et où la sueur suinte sous les casques. Entre joint de culasse et arbre à came on y échange des astuces, on se passe des boulons et des clés de 12 aussi. Le tout dans une ambiance de franche camaraderie baignant dans l'huile de vidange.

Peut-on se risquer à dire, Nick, qu'il y a un lien entre la musique et l'automobile ?
Pas vraiment. Même si dans une bagnole y a une batterie, c'est plutôt difficile de faire rentrer une bagnole dans une batterie. Et à part le boucan qui est assez identique, finalement, y a pas beaucoup de points communs entre musique et automobile. Et c'est plus facile de piloter une bagnole qu'une batterie. En plus, quand tu pilotes, tu es concentré sur toi-même et t'es plutôt seul. Il est d'ailleurs assez difficile de rentrer le public dans le cockpit d'une voiture.

Pour finir, Nick, peut-on espérer un jour la reformation de Pink Floyd ?
Oui, vous pouvez.

Merci.
Je vous en prie.


A cet instant, Roger Waters apparut dans le grand magasin. Il hurlait : "Salaud, t'as sorti ton bouquin avant le mien !" "Mais qu'est-ce que tu fous là ?" a dit Nick. "Je viens te péter la gueule !" a dit Waters. "Ca va pas la tête !" a dit Nick. "Y'a que moi qui ai le droit d'écrire sur Pink Floyd !" a dit Waters. "Moi aussi j'ai fait partie de Pink Floyd. Même que j'ai composé pour "Ummagumma" !" a dit Nick. "On le saura !" a dit Waters. Alors Nick a envoyé un grand coup de godasse dans les valseuses de Waters. Ce dernier poussa un cri qui fit plus penser à un chanteur de heavy-metal qu'à du Pink Floyd. Profitant que Waters courait tant bien que mal prendre au rez-de-chaussée un sac de glaçons au rayon congelés pour s'en passer sur les bijoux de famille, Nick lui asséna un coup de boule sur la tronche. Sous le choc, Waters s'écroula dans le rayon des daubes d'Universal. "Putain, il est trop con ce mec ! Fallait pas me pousser à bout ! Merde !" a dit Nick qui avait perdu un instant de son contrôle légendaire. Alors, pendant qu'on embarquait Nick Mason au commissariat et Waters à l'hôpital, je suis rentré chez moi tout bouleversé.