ACCUEiL

DiSQUES

CHRONiQUES MUSiCALES

AUtRES

James LaBrie
L'interview


Ne reculant devant aucun sacrifice, j'ai rencontré le beau et sémillant James Labrie, chez lui dans sa cabane au Canada blottie au fond des bois. On y voit des écureuils sur le seuil. Si la porte n'a pas de clé, c'est qu'il n'y a rien à voler sous le toit de sa cabane au Canada. Il m'attendait dans sa belle chemise à carreaux, tenant à la main une hache car prévoyant, il était en train de couper du bois pour le prochain hiver canadien qui sera rigoureux n'en doutons pas. Au loin un orignal s'enfuyait dans un bois d'érables.

C'est sympa cet animal !
Peut-être. En tout cas, c'est con quand c'est en groupe.

Ah bon ? Pourquoi ?
On sait jamais si c'est des orignals ou des orignaux.

James, on vous connaît peu. Parlez-nous un peu de vous.
Eh bien, je suis né il y a des plombes dans un trou perdu de l'Ontario...

Comment ça s'appelle ?
Désolé, mais j'ai jamais réussi à prononcer son nom...

C'était cool ?
A part des troupeaux d'orignaux, il n'y avait pas grand chose qui passait et à peine sorti de l'abri douillet du ventre de ma patiente mère, je hurlais déjà comme un dératé Pull me under tant et si bien que mon père demanda le divorce et disparut définitivement dans la nature et par la même occasion de ma vie.

Putain, c'est hyper triste !
En effet. Je suis en quelque sorte la cause de la séparation de mes parents. C'est d'ailleurs le thème de mon premier album solo et c'est sans doute, depuis cette date, que traumatisé par le départ de mon père maçon, inconsciemment, je m'évertue à chanter comme une gamate.

Ah bon ?
Parfaitement. C'est mon psychiatre qui l'a dit.

Que s'est-il passé après ?
A cinq ans, j'ai rencontré Pavarotti au McDo de Toronto.

Le gros barbu qui chantait avec Bono ?
Le même. Ce dernier bouffait des frites en chantant We are the world. Pour moi, ce fut le déclic. Je décidai qu'à partir de ce jour, je me lancerais dans la chanson et laisserais tomber les merguez.

C'est bizarre comme viennent les vocations.
En effet. Ensuite vers seize ans, j'ai fait partie du groupe Kraftwerk avec lequel j'ai ingurgité des tonnes de choucroute et j'ai enregistré l'album Radioactive Toy.

Et après ?
Ensuite pour cause de divergences musicales, mes collègues voulant se lancer dans un style plus commercial, j'ai quitté le groupe en emportant avec moi mon triangle à bidouillage électronique et leur laissant la choucroute.

Vous avez bien fait.
Ca a été assez dur à cette époque. C'était en quelque sorte ma traversée du désert. J'ai profité de ces moments de désoeuvrement, assez désabusé, pour écrire un très beau livre : James Labrie, un artiste incompris qui se vendit à plus de 11 exemplaires. Au fil de 355 pages, je raconte mon enfance difficile, ma rude adolescence et crie dans le désert mon génie incompris. Vous en voulez un exemplaire ?

Non. Vous avez fait quoi après ?
Après, à 19 ans et demi, j'ai gagné la Stanley Cup de justesse aux tirs au but. A 20 ans, j'ai rencontré John Petrucci au Mc Do de New Jersey où il avait ses habitudes.

Ah ! Ca c'est un moment important, je suppose pour la suite de votre carrière ?
Tout à fait. Ce dernier bouffait des frites en chantant Les restos du coeur de Coluche. J'ai repris alors la chanson en choeur avec lui, ce qui provoqua une véritable émeute dans le McDo. Mais, pour moi ce fut le déclic. Je décidai qu'à partir de ce jour, je me lancerais dans la chanson et j'arrêterais de bouffer des saucisses à la moutarde.

Sage décision.
Quelques jours plus tard, avec Petrucci, on s'est retrouvé et on a formé un groupe appelé "Dream theater".

Pourquoi ce nom bizarre ?
C'était en souvenir du groupe "Tangerine Dream" dont faisait partie Petrucci quelques temps avant cette rencontre décisive. On a ajouté "Theater" pour faire joli. A partir de ce jour et de notre premier album Métropolis Adieu, ce fut le succès mondial non démenti depuis.

En effet.
Malheureusement, l'an dernier, suite à des divergences concernant notre McDo préféré, le groupe s'est séparé et j'ai dû me lancer à contre cœur dans une carrière solo.

Avez-vous gardé de bons rapports avec les autres membres de Dream Theater ?
Oui, ils aiment beaucoup ce que je fais. Mais ça coince toujours un peu avec Mike.

Portnoy ?
Oui. Avec lui, on s'accroche. Il jouait tout le temps trop fort pour qu'on m'entende pas. Il était quelque part jaloux de mon charisme et de mon succès. D'ailleurs, avant que le groupe se sépare, je me souviens lui avoir même dit, à bout de nerfs, pendant les dernières répétitions : "Merde, Mike, arrête de taper comme un dératé sur tes caisses, on s'entend plus hurler ! Quel connard ce mec !" Du coup il s'est cassé aussi.

Ca a pas dû vraiment arranger les choses.
Pas vraiment !

Finalement vous avez bien fait de partir.
C'est sûr. Et je le regrette pas même si en fin de compte, ça me fait de la peine pour les autres. Ils auront du mal à s'en remettre.

Quels sont les albums qui ont marqué votre carrière ?
D'abord Radioactive Toy avec Kraftwerk.

C'était quoi comme musique ? Je connais pas.
C'était une musique électronique de grande finesse où l'on réussissait après beaucoup de persévérance à entendre, si l'on a une bonne chaîne Hi-fi, mon excellente performance, toute en délicatesse et demi teinte au triangle à bidouillage électronique.

Et avec Dream Theater ?
Metropolis Adieu où pour un début on avait frappé fort !

C'était quoi comme style vos premiers albums ?
C'est du heavy déstructuré avec une orientation décalée vers une musique progressive innovante.

Quoi d'autre ?
Y'a Six degrees of inner flatulence, véritable sommet de notre œuvre d'une grande, euh..., flatulence. Nous étions alors un groupe catalogué comme le plus important (il nous fallait quatre 50 tonnes pour porter tout le matos) de heavy déstructuré avec une orientation décalée vers une musique progressive innovante.

Et vos disques en solo ?
Numéro 1 est très beau et abouti malgré son numéro. Je crois que loin des débordements de Dream Theater, j'offrais une oeuvre intimiste entre Pavarotti et Domingo. Le Numéro 2 est pas mal non plus. J'y continuais dans cette belle voie que je me suis tracé pas loin d'une reconnaissance mondiale et dans l'espoir de chanter bientôt We are the world près de Pavarotti pour les petits enfants africains qui n'ont pas la chance de pouvoir se gaver de chips au Mc Do du coin.

Quels sont vos projets ?
Je vais sortir incessamment sous peu James Labrie sings the best crooners in the world où, j'ai pas peur de le dire, au sommet de mon art, je reprends toutes les meilleures guimauves de Bing Crosby, Dean Martin et Frank Sinatra, soit un très beau cadeau de nouvel an pour belle-maman.

C'est une délicate attention.
Je suis très attaché aux valeurs traditionnelles qui pérennisent nos institutions.

Je me suis laissé dire que vous écrivez toujours. Qu'en est-il exactement ?
Eh bien je viens de sortir Moi, James Labrie. Je peux vous en lire un extrait ?

Non.
Bon, allons-y. "Un jour, le 24 décembre au soir, alors que la neige tombait drue au dehors, recouvrant mon petit bonhomme de neige, j'ai entonné près de l'arbre "Petit papa Noël". Quand le sapin a commencé à tomber, d'un coup, tout le monde est parti dans la cuisine bouffer cette saloperie de dinde. C'est alors que j'ai compris que j'avais LE don ! "

C'est très fort. Vous avez écrit autre chose ?
Oui, bien sûr. C'est The voice où je raconte comment j'ai composé Stranger in the night pour Frank Sinatra et que je suis le seul et unique James Labrie et je le crie bien fort face à l'incompréhension des masses béotiennes et je ne manque pas de dire aussi que j'emmerde tout le monde…

Quel éternel rebelle vous faites James !
Je veux oui !... Un autre extrait puisque vous insistez : "Un soir que, seul, je lisais Merleau-Ponty à la chandelle, me vint d'un coup, entre deux merguez, quelques paroles : "Strangers in the night, Exchanging glances, Wondering in the night, What were the chances, We'd be sharing love, Before the merguez was finished." Je trouvai que c'était pas dégueu... Bon. plus tard, j'arrangeai un peu la fin et décidai d'une mélodie, ce qui fut facile. Elle me vint la nuit suivante.

Il semble que vous avez pris conscience de votre extraordinaire potentiel, non ?
C'est sûr et je le dis sans fausse modestie, je suis beau, je suis inspiré, je compose de super trucs, je chante bien... Bon d'accord, vous avez d'autres questions ?

Euh... non.

 

Alors, après avoir bu un délicieux sirop d'érable, je quittai à regret cet artiste attachant, me disant au fond de moi-même et en mon for intérieur que j'avais une sacrée chance de faire ce beau métier de rock-critic !

_________________________________________
l'image du jour

Le fameux bouquin de James Labrie !

Oui, je sais, vous attendez tous la chronique de ce livre très émouvant avec impatience, eh bien, ce sera pour plus tard...