Joe
Hisaishi
Au Zénith, Le 23 Juin 2011
Après avoir vu 3500 personnes
taper des pieds et des mains, debout,
extatiques, pace qu'elles ont entendu
la musique d'un dessin animé
avec des enfants qui chantent "TOTORO
! TOTORO !" devant un écran
géant sur lequel on voit
une sorte de gros chat avec un parapluie,
je peux décemment dire que
j'ai tout vécu. Je croiserais
un tyrannosaure demain matin, en
allant acheter mon pain, que j'en
resterais blasé.
Bref, si vous aussi avez ronchonné
des heures durant parce que les
paroles étaient en anglais
plutôt qu'en japonais, sans
doute étiez-vous au Zénith
pour voir Joe Hisaishi, comme moi.
Enfin, je dis ça mais je
n'ai pas ronchonné, pour
ma part, puisque j'ignorais qu'il
y avait des passages chantés
dans les morceaux d'Hisaishi. Comprenez
bien que j'ai essayé de regarder
les dessins animés de Miyazaki
parce qu'ils sont géniaux
mais j'ai assez vite arrêté
parce qu'ils ne le sont pas. Je
n'écoute pas Hisaishi pour
ses musiques de dessins animés
mais de films et j'avais même
dit : "J'irai le voir s'il
joue "Le mécano de la
General" et "L'été
de Kikujiro"" en pensant
qu'il ne les jouerait sans doute
pas. C'était un peu comme
si j'avais dit, à l'annonce
d'un concert de Renan Luce : "S'il
joue le concerto pour piano et orchestre
n°20 en Ré mineur de
Mozart, j'y vais !". C'était
une façon de dire que je
n'avais pas que ça à
faire de mettre cinquante billets
sur le bonhomme pour entendre des
musiques de dessins animés
que je n'ai même pas vus.
Puis je me suis enquis de la set
list et j'ai constaté qu'Hisaishi
jouait les morceaux susdits. Or
je n'ai qu'une seule parole et je
me suis rendu au Zénith,
ce jeudi soir, le 23 juin 2011,
vers 20h. Pour l'occasion, Joe Hisaishi
avait rameuté toute la Japan
expo, c'est à dire globalement
des jeunes (pour les places à
55 euros autour de moi, tout du
moins, j'imagine que c'était
encore plus le cas pour la catégorie
inférieure, sans doute moins
pour la supérieure), venus
écouter religieusement sa
musique. Oui, j'ai lu le mot "religieusement",
quelque part. J'en remercie son
auteur parce que c'était
quand même un peu de ça
qu'il s'agissait. Je ne suis pas
un adepte de la religiosité
artistique et j'ai constaté
que pas mal de spectateurs étaient
sur la brèche comme ils le
sont sans doute concernant Miyazaki
et aussi pour tout un tas d'autres
trucs intouchables. Toujours est-il
que l'absence de recul a le mérite
de toujours mettre de l'ambiance
où les désabusés
ne bronchent pas.
Ce que j'ai retenu de ce concert,
outre un public de fans, c'est le
thème, sympathique, de "Princesse
Mononoke", l'ensemble du "Mécano
de la General" (même
si j'ai regardé les images
sans vraiment écouter la
musique que je connais par coeur),
"Hana bi" et "Kids
return", les cuivres de "Let
the bullets fly", "Departures"
et évidemment "Summer"
qui a eu la première standing
ovation de la soirée. Le
final, par contre, avec le retour
des choristes, a été
plus difficile. Je ne sais pas si
j'ai souffert davantage sur "Ponyo"
ou sur "Totoro" alors
que ma voisine quadragénaire,
elle, était au bord des larmes.
Sans plaisanter, hein, j'ai tout
vécu. Sinon, il y avait aussi
une aération, une clim ou
un type qui écoutait de la
techno avec des basses "boum,
boum". Chaque fois qu'Hisaishi
était seul au piano, j'entendais
sur ma gauche un gros ronflement
désagréable. Déjà
que le Zénith est un hangar
qu'on sonorise comme on peut, si
en plus ça vrombit sur "L'été
de Kikujiro", je ronchonne.
Bref, ça ajoutait au côté
"fait à la va-vite"
du concert avec ses musiciens recrutés
à la dernière minute
sur facebook.
Mais la qualité principale
de ce concert, me direz-vous, était
peut-être finalement dans
cette somme de paradoxes, ses 200
choristes et son orchestre symphonique
pour jouer des musiques de dessins
animés, devant une salle
comble et des milliers de personnes
émues. Et puis c'était
un concert de charité pour
le Japon, voyez, moi je fais dans
le caritatif.
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