Ne
reculant devant aucun sacrifice,
j'ai rencontré le beau
et sémillant James Hetfield,
chanteur du célèbre
groupe Metallica. Si pour vous,
ce groupe c'est trop de la balle,
c'est le summum du metal de
la mort et ça déchire
grave, passez votre chemin !
Pour les autres, sachez que
les confessions ci-dessous du
sympathique James Hetfield vont
éclairer d'un nouveau
jour le parcours actuel d'un
groupe qui, abandonnant sa furia
métallique, donne libre
cours à une autre facette
de sa personnalité toute
en délicatesse, chasse,
pêche et traditions.
James,
d'après des sources bien
informées, il paraît
que votre nouvel album qui va
sortir sous peu est tellement
folk qu'à côté
le dernier cd des Chieftains
c'est limite death metal...
Parfaitement. On y
a travaillé d'ailleurs
d'arrache-pied avec des sabots
pour faire plus vrai. En contrepartie,
ça a fait super mal aux
arpions. Mais le résultat
est hyper impressionnant.
A
ce point ?
Oui. C'est le genre de truc
capable de faire danser une
bonne gigue à une horde
de hooligans venant de péter
la gueule à des supporters
de l'équipe adverse parce
qu'elle avait gagné bien
qu'ayant tiré deux fois
hors des cages...
Comment
ça ?
Les buts marqués à
l'extérieur comptent
double.
Pourquoi,
James, un tel changement musical
?
Metallica avait tout dit dans
le metal. On avait fait le tour
de la question. Même que
dans notre dernier album on
savait plus quoi faire.
Je
n'avais pas remarqué.
T'as pas été le
seul, p'tit gars. Alors plutôt
que de jouer toujours la même
chose, on a préféré
prendre un virage vers la musique
qu'on préfère.
Vous
aimez le folk ?
Bien sûr. C'est quelque
part nos racines. Faut savoir
que toute la musique qu'on aime,
elle vient de là, elle
vient du folklore.
Ah
bon ?
Ouais. Sans folklore pas de
rock. Sans rock pas de metal.
Sans metal pas...
De
Metallica ?
Tu te gourres, mec. Y'a Metallica
et y'aura toujours Metallica
car il est à la fois
au début et à
la fin du cycle. Tu piges ?
Euh...
Metallica, c'est comme un retour
aux sources.
Et
votre son heavy, sorte de marque
de fabrique du groupe ?
C'est fini tout ça, mon
gars. Comme il y a eu Reload,
maintenant y'a Remetallica !
Comment
ça ?
Moi, espiègle ménestrel,
je taquine déjà
de la harpe celtique, aérien
comme un zéphyr et Kirk,
joyeux trouvère, fait
jouer ses mains sur un morceau
de bois.
C'est
une métaphore ?
J'en sais rien. C'est une mandoline
c'est sûr mais je connais
pas la marque.
Ce
n'est pas trop difficile de
s'adapter à ces nouveaux
instruments ?
Pas vraiment. Mais je coince
toujours mes putains de gros
doigts entre les cordes. D'un
autre côté, comme
ma harpe est sanglée,
je pourrai quand même
continuer d'arpenter la scène.
C'est
une bonne chose.
Oui. Surtout qu'on se refait
pas.
Et
les deux autres ?
Lars promène un archet
capricieux sur son violon et
Bob pianote sur un accordéon
diatonique. Et quand Lars est
au violon et Bob à l'accordéon,
faudrait avoir deux jambes de
bois pour ne pas danser la polka
!
Quel
thème avez-vous développé
?
C'est un concept-album "Folklorica"
qui parle de nos belles campagnes,
de la charmante nature, des
petits oiseaux, des jolies fleurs,
de la fraîche rosée
du matin et éventuellement
de l'amour courtois en parcourant
la carte du tendre.
Beau
programme.
Je veux oui. Et il y a des titres
comme "I love you pretty
nature", "The birds
sing in the tree", "The
flowers are beautiful",
"Oh my lady d'Ardèche",
"The little house in the
little prairie" et aussi
une adaptation de Francis Cabrel,
"Little Mary I wait for
you frigorified under a tuile
of your roof."
C'est
quand même surprenant,
cette évolution, mon
cher James !
Pas forcément.
Comment
ça ?
Faut savoir que Metallica, ça
a toujours été
quatre putains de folkleux,
quelque part.
Où
ça ?
Au niveau de notre vécu
tout en traditions et comme
qui dirait existentiel... Déjà
un titre comme "For whom
the bell tolls" ça
allait hyper loin quand t'y
réfléchis un peu.
Ah
bon ?
Oui. Et même que le titre
complet c'était "For
whom the bell tolls in the small
church of the village in the
morning when the day begins
between the pretty flowers and
the little birds."
C'est
super.
Ouais, mais notre marque de
disques n'était pas particulièrement
d'accord.
Je
la comprends un peu.
C'est vrai que quand tu t'appelles
Metallica, ça craint.
Alors, on a mis un peu de bière
dans notre eau de rose. Mais
maintenant c'est fini !
Ce
virage hyper folklorique ne
risque-t-il pas de déconcerter
vos fans ?
On s'en fout. Et puis, faut
savoir qu'il y en a qui achètent
n'importe quoi du moment que
ça s'appelle Metallica.
Quand on voit les ventes de
nos derniers albums, y'a pas
de souci à se faire !
On
vous imagine volontiers, vous
et vos musculeux congénères,
agressifs en diable, roquets
hargneux, la bave aux lèvres,
plus burnés qu'un groupe
de death extrême et comme
prêts à mettre
un coup de rangers dans les
parties du premier gus qui ouvre
sa grande gueule.
Agressifs ? Hargneux ? Sûrement
pas. Ca va pas la tête
!
Euh...
Nous, on est plutôt des
gars tranquilles, un rien romantiques,
très respectueux des
vraies valeurs, euh... vraies.
Ah
bon ?
Absolument. Dernièrement
on s'est regardé "Le
cheval d'orgueil" en V.O.
sous-titrée en breton.
On est très attachés
aux zus et costumes.
Les
us et coutumes ?
C'est ça. Et toujours
prêts à retrouver
des amis pour se raconter de
belles histoires de nos villages,
contempler, ravis et placides,
un magnifique lever de soleil
sur la riante campagne verdoyante,
collectant par monts et par
vaux des feuilles et des fleurs
pour compléter notre
bel herbier tout en écrivant
une jolie ode à dame
nature sur un beau cahier d'écolier
et pousser la romance a capella
en langue d'oc à une
heure du mat' sous les volets
d'une gente damoiselle.
Tout
ça ?
Parfaitement. Notre truc à
nous c'est le terroir, la nature
dans toute sa splendeur, les
petits ruisseaux qui gambadent
joyeusement dans les prés,
le gai rossignol et le merle
moqueur qui chantent de branche
en branche, les gentilles coccinelles
et les vaches rousses, blanches
et noires made in Normandie
qui chient sans souci du valeureux
randonneur dévoreur de
GR ni du gentil cueilleur de
champignons...
Mais
alors, arrêtez-moi si
je me trompe, James, les metalleux
purs et durs, c'était
du pipeau ?
Mystification totale mon pote.
Si Metallica c'est encore le
metal de la mort qui te met
sur le cul et fabriqué
par des mecs bardés de
cuir faisant des doigts d'honneur
alors ta grand-mère joue
du biniou à propulsion
nucléaire dans le dernier
album d'Alan Stivell.
Pas
possible !
Faut arrêter de déconner,
mec. Metallica est en passe
de devenir the number one d'un
super créneau hyper porteur.
Le renouveau des peuples celtes,
c'est pour tout à l'heure.
On sera un festival interceltique
à nous tous seuls. Et
ça va pas tarder à
faire un malheur !
Ah
bon ?
Parfaitement. On aura vite fait
de subjuguer tout un immense
public du troisième âge
qui, pas fou, en redemandera
encore. On a franchi un palier
et on se tourne maintenant tout
en délicatesse et avec
une certaine finesse vers un
auditoire attaché au
patrimoine et à ses racines.
Maintenant préparez vos
sabots. A partir de dorénavant
Metallica ce sera plutôt
bourrée que bourrin.
Voilà
qui est bien dit, James.
Pas de quoi, mon p'tit gars.
Alors,
James Hetfield a tenu à
me faire écouter des
extraits du nouvel album du
groupe. Ce fut énorme.
Je n'avais rien entendu d'aussi
entraînant, authentique
et convivial depuis La Joyeuse
Aubade du Haut-Poitou dont j'ai
vu le spectacle la semaine dernière
au Foyer rural de Trougnolle-les-Pacoules.
Ceux qui croyaient le groupe
mort en seront pour leurs frais.
Le Metallica nouveau est arrivé.
Vive Metallica !