Raphaël Cardetti
Les
Larmes De Machiavel (2005)
Ce livre, pour commencer, a un
quatrième de couverture
très attractif "Témoin
d'un des meurtres, Niccolo Machiavel,
jeune secrétaire de la
chancellerie, met à profit
sa connaissance des rouages politiques
pour mener son enquête et
se trouve bientôt plongé
au cœur du plus grand scandale
de l'époque" Wow !
A l'aube du 16ème siècle,
à Florence, Machiavel,
des complots, des meurtres, une
enquête, des prostituées,
super !
Le livre est globalement raté.
Ouais, je commence fort.
Ecrit très gros, seulement
297 pages, il y avait forcément
des choses à ajouter. Par
exemple, on y trouve des personnages
qui auraient pu être passionnants
mais qui sont sous-traités,
des relations entre membres du
sexe opposé qui auraient
largement leur place dans la cour
de récréation d'une
école primaire (la scène
de sexe est risible. Evidemment,
c'est la plus jolie des filles
qui s'envoie le timide boutonneux.
Vraiment mauvais) et surtout un
personnage principal (Machiavel)
qui est inexistant. En résumé
ce livre est un épisode
du club des cinq ! Une bande de
potes d'une vingtaine d'années
fondamentalement bons malgré
quelques défauts qui permettent
aux lecteurs de s'identifier (le
faire valoir Ciccio étant
le plus intéressant) s'attaquent
à d'horribles tueurs qui
massacrent absolument tout ce
qui passe à portée
mais étrangement pas les
héros qu'ils laissent toujours
en vie en disant : "Holala,
j'ai pas le temps là, j'ai
oublié d'éteindre
le gaz" ou un truc du style.
Franchement, il ne manquait rien.
Il suffisait de respecter le quatrième
de couverture. Plutôt que
de s'appuyer sur les personnages
faibles (les héros, jeunes
et inutiles dans la république
florentine), j'aurais préféré
qu'on s'attarde sur les puissants.
L'auteur creusait un chouïa
plus et c'était bon. J'aurais
aimé avoir à faire
au mercenaire Malatesta, au gonfalonier
Soderini, à Savonarole
ou même au chirurgien Corbinelli.
J'aurais amplement préféré
des espions, des complots et des
joutes verbales plutôt que
la vaine parlote d'adolescents
en retard qui, en toute logique,
ne peuvent rien résoudre
du tout dans cette ville en crise.
Autre problème, ce petit
monde a un comportement étrangement
moderne. Je me demande si changer
uniquement l'époque en
conservant les attitudes de chacun
choquerait. Par exemple, le chirurgien
pourrait jouer sans problème
dans Les Experts le samedi
soir sur TF1.
Maintenant que j'en ai terminé
avec ce léger taillage
de costard, je vais parler de
ce qui est bien : l'intrigue.
Un peu à l'image de bien
des auteurs de science fiction,
ce livre est dépendant
à 98% de son intrigue.
Combien de bouquins de SF sont
écrits avec les pieds mais
tiennent en haleine grâce
à leur histoire bien ficelée
? Assurément beaucoup.
Dans "Les larmes de Machiavel",
je ne vais pas vous le cacher
plus longtemps, la fin, elle tue.
Allongé par terre, un coude
appuyé sur les rouleaux
de PQ et les pieds dans la douche,
j'ai drôlement été
tout retourné, tel une
crêpe.
La fin est vraiment digne d'intérêt.
J'vous jure, on dirait du Shyalaman
! Comme dans ses films (Sixième
sens et Incassable tout
du moins), il y a une intrigue
à deux niveaux. On lit
pour savoir qui est le meurtrier
(c'est une enquête après
tout) et ensuite, sans qu'on ne
demande rien, il y a une putain
de révélation, j'vous
dit que ça. En fait, la
construction de ce livre est identique
à celle de bien des films
récents au ciné.
Le contenu est passable, on s'ennuie
un peu mais il n’est pas
très long, alors on se
dit qu'on va aller jusqu'au bout.
Et finalement, tout est remis
en question, wow, trop fort !
Dans "Les larmes de Machiavel",
c'est la même chose. Si
les héros se comportent
comme s'ils avaient 12 ans, si
Machiavel ne se rend pas compte
que sa dulcinée est une
fausse intellectuelle coincée,
si les personnages de Vettori,
Boccadoro (ceux qui parlent italien
comprendront que c'est la prostituée),
Marco etc. ne sont pas vraiment
traités, c'est pour éloigner
au maximum le lecteur du dénouement.
C'est fourbe et ça gâche
la lecture mais c'est une façon
de voir les choses. Evidemment,
la fin parait encore meilleure
lorsqu'on a subi le reste du roman.
Donc voilà ce qu'il en
est. "Les larmes de Machiavel"
est un livre pour préadolescents
dans la droite lignée du
clan des sept et bénéficie
d'un final morbide, sombre et
magnifiquement bien trouvé,
seul détail réellement
adulte de ce livre. Quant à
la description des meurtres, elle
fascinera bien plus votre cousin
perpétuellement intrigué
par la mort que n'importe qui
d'autre.
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