David
Bowie
Heathen
(2002)
Ah,
il savait y faire le père
Bowie et il avait bien mené
sa barque durant sa longue carrière.
Il avait tout compris au show-business
et aux médias. Il savait
qu'avant d'être, il importait
de PARAITRE. Et en ce sens,
ce fut un showman avisé,
plus soucieux de son image que
sa musique. Et il n'en faut
souvent pas plus pour faire
une grande et belle carrière
auprès du public, qu'on
appelle paradoxalement "grand".
De plus, en fin stratège,
il sut grâce justement
à ce faux-côté
décalé, pseudo
"devanceur de modes",
donner l'impression qu'il était
un artiste d'avant-garde. Bien
joué ! J'en veux pour
preuve l'attrait qu'il exerça
(et exerce encore) sur les rock-critics,
pas toujours les plus nuls des
revues spécialisées
du monde entier...
Et la musique dans tout ça
?
Eh
bien, c'est de la pop tout à
fait dans les normes, banale,
et même, pire, un ton
en dessous des milliers de groupes
anglais qui poussaient à
la vitesse grand V et peuplaient
les tristounets hit-parades
grands-bretons de ces temps
lointains.
Cet album de Bowie est un peu
à l'image de sa pochette
et son livret intérieur
: triste et
sans attrait. Bien sûr,
comme d'habitude, pour faire
bonne mesure et s'attirer l'attention
bienveillante de la critique
encore plus snob que sourde,
il s'entoura judicieusement
avec, entre autres, Lisa Germano
(au violon), Tony Levin à
la basse et même Tony
Visconti mais rassurez-vous,
Bowie n'a pas remis de rouge
à lèvres !
On
ne peut pas dire que cet album
soit mauvais, non. Il est quelconque,
d'une profonde banalité…
comme la plupart de ses derniers
albums. Toutes les chansons
se ressemblent dans un style
pop-crooner fatigué,
un rien blasé, nostalgique
et mélancolique, impression
que renforce la présence
constante de cordes. Parfois
une guitare électrique
nonchalante s'épanche
un peu, mais à peine
comme pour laisser penser que
Bowie fait du rock.
Ce
dernier était passé
maître dans l'art du show-business
: trouver le juste milieu entre
le minimalisme et l'esbroufe,
permettre aussi à l'auditeur
de toujours se retrouver et
s'attirer toutes les bonnes
grâces (cf. les titres
sans intérêt judicieusement
remixés par Moby ou Air,
artistes plus dans l'air du
temps que de qualité).
Maintenant un détail
me turlupine : que fait donc
dans ce double cd, le claviériste
Jordan Rudess de l'ineffable
groupe de heavy-baston-prog
Dream Theater ? En tout cas,
le jeu de Rudess est la seule
vraie satisfaction de cet album.
En effet, on ne l'entend pas
! Et si je n'avais pas réussi
à lire son nom dans le
fouillis inextricable de l'épouvantable
livret intérieur, je
n'aurais jamais pensé
qu'il eut joué dans cette
œuvre. Sacré Bowie,
il était vraiment très
fort !