Ne
reculant devant aucun sacrifice,
j'ai rencontré le beau et
sémillant Benoît Poher,
le sympathique chanteur de Kyo,
le groupe qui monte dans le firmament
de la variété, euh...
trash. Notre inoubliable rencontre
s'est passée lors de l'enregistrement
du clip de leur dernier tube. Benoît
a accepté, très simple,
de répondre à mes
questions.
Benoît, est-ce vraiment nécessaire
de faire un clip ?
Bien sûr. Il faut que notre
public voit notre musique.
Mais,
la musique ça s'écoute
avant tout, non ?
Pas du tout. La musique c'est pas
forcément un truc pour mal-voyants.
C'est aussi un truc pour mal-entendants.
Vous
dites ?
Parfaitement. C'est avant tout un
concept visuel. Le look, la mise
en scène, tout est important.
Il faut savoir que Kyo ça
se regarde d'abord. Après,
éventuellement, on peut le
cas échéant, l'écouter
mais c'est pas obligatoire.
Ah
bon ?
Absolument.
Pourtant
il y a des musiques qui existent
en dehors du support visuel.
Peut-être mais personne les
écoute, ça se vend
pas et ça cartonne pas dans
les charts devant des super trucs
comme Yannick Noah ou O-Zone.
Benoît,
votre prénom, c'est un hommage
à l'écrivain ?
A qui ?
Ca
vous fait quoi d'avoir le même
nom qu'un grand homme politique
français ?
Qui ça ?
Quel
est le guitariste le plus rapide
du monde ?
Putain, elles sont trop dures vos
questions !
Combien
ça fait deux fois trois ?
Euh... cinq ?... Non, six !
Pourquoi
ce nom de Kyo ?
C'est en référence
aux mangas.
C'est
quoi ça ?
Des bandes dessinées japonaises.
Et Kyo est le nom de l'une d'entre
elles.
Ah
bon ?
Faut savoir que cette littérature
a bercé notre enfance.
Est-ce
quelque part un peu de votre culture
?
Beaucoup même. Et c'est là
en quelque sorte qu'on a puisé
notre inspiration.
Comment
ça ?
Les mangas c'est avant tout un monde
de poésie.
Ah
bon ?
Oui. Et quelque part on a dû
insconciemment y puiser un peu de
cette sensibilité et ce lyrisme
qui caractérisent le groupe.
Benoît,
vous vivez toujours dans une maison
de verre, à moitié
remplie de son eau ?
Sûrement pas. Faudrait être
con !
Comment
ça ?
Le niveau faisait que monter, alors
j'ai foutu le camp !
Certains
vous accusent de faire un peu trop
dans la facilité.
Ils ont raison.
Ah
bon ?
Oui. Nous, on commence d'abord dans
la daube. Après bien plus
tard, quand on sera assez connus
on fera dans l'underground.
Curieux
comme démarche !
C'est la démarche inverse
des autres groupes. C'est un nouveau
concept qu'on a crée.
Comment
ça s'appelle ?
C'est du "trash-underground".
Pourquoi
avoir choisi Kyo, cette bande dessinée
et pas une autre ?
C'est vrai qu'on aurait pu choisir
Dragon Ball. Mais ça
n'allait pas avec notre style musical.
Si on avait été un
groupe de metal, je dis pas mais
vu qu'on fait pour l'instant du
"trash-variété"...
Justement,
Benoit, que signifie "trash-variété",
ce mot abscons ?
Soyez poli !
Hein
?
C'est pas con ce mot. Même
que c'est nous qui l'avons trouvé.
Ah
bon ?
Parfaitement. On a vraiment révolutionné
la musique dans le sens où
nous avons inventé ce nouveau
concept.
Encore
un ?
Oui c'est vrai, c'est peut-être
un peu trop. Faudrait qu'on s'arrête...
C'est
quoi exactement le "trash-variété"
?
C’est beaucoup de variété
avec un peu de trash.
Ca
veut dire quoi "trash"
?
Trash, au départ ça
veut dire quelque chose comme poubelle.
Mais il ne s'agit pas de faire,
comme on pourrait le croire, de
la variété poubelle.
Ah
bon ?
Pas du tout. Au contraire.
Comment
ça ?
Et bien, Kyo veut quelque part transcender
un genre appelé variété
et lui donner en quelque sorte ses
lettres de noblesse.
Beau
projet s'il en est.
C'est sûr. On peut même
dire que si la variété
c'est de la daube il y a aussi Kyo.
Benoit,
êtes-vous d'accord avec Léo
Ferré qui disait qu'il n'était
qu'un artiste de variétés
et ne pouvait rien dire qui ne puisse
être dit "de variétés"
?
Bon, je connais pas ce groupe Réseau
Ferré mais c'est sûr
que s'ils n'étaient qu'un
artiste de variété,
c'était pas forcément
très bon pour eux. Et c'est
plutôt réduit pour
exprimer quelque chose. Kyo, c'est
d'abord quatre artistes qui ont
plein de trucs à dire. Et
en plus on est trash !
Arrêtez-moi
si je me trompe, Benoît, mais
si j'ai bien compris, Kyo n'est-il
pas en fin de compte la confluence
de deux courants musicaux assez
contradictoires mais concomitants
?
Con qu'aux mi-temps ?
Benoît,
quelles sont quelque part vos influences
?
Où ça ?
Quelque
part.
Pearl Jam, Soundgarden et surtout
Nirvana.
Peut-on
alors se risquer à dire que
Kyo c'est malgré tout du
rock ?
Absolument pas.
Ah
bon ?
Bien sûr. C'est pas parce
qu'on écoutait trois mois
du grunge pour faire les beaux devant
les nanas de la 4° B du collège
qu'on fait du rock. On a écouté
aussi, quand on était seuls
à la maison, Patrick Fiori
et David Hallyday qui nous ont aussi
influencés. On va pas en
conclure pour autant que Kyo c'est
de la variété.
C'est
ça alors le trash-variété
?
Si on veut.
Ce
sera en quelque sorte le mot de
la fin.
Quoi, "en quelque sorte"
?
Non,
"trash-variété".
C'est pas un peu con comme mot de
la fin ?
Alors,
avant de m'en aller, je demandai
à Benoit s'il pouvait me
signer un autographe sur la photo
du groupe que je sortis alors de
la poche intérieure de mon
blouson commandé la semaine
dernière sur le catalogue
automne-hiver de la Redoute. Après
avoir chaleureusement remercié
Benoît, je le quittai comme
à regret. Arrivé dans
la rue, je pensai, me laissant aller
à une jubilation bien légitime,
que dès arrivé chez
moi, je mettrai l'autographe de
Benoît en bonne place dans
ma grande collection et il n'en
serait sûrement pas le moindre
!
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