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Beau et fascinant

Jean Carrière
L'épervier de Maheux (1972)

 

"L'épervier de Maheux", qui ne faut pas confondre avec "L'épervier de Mathieu", est un roman qui parle en quelque sorte du combat de l'homme contre une condition précaire et une nature hostile, tentatives illusoires de survivre. Ouais, comme je te le dis.

Abel Reilhan en est le héros tragique.

L'action se passe sur de hautes solitudes. Là où la nature semble avoir définitivement pris le dessus. Dans un lieu appelé Maheux. Soit de vieilles bâtisses égarées sur le plateau au milieu de nulle part. Prises entre une chaleur estivale suffocante et une excessive froidure hivernale. Un de ces endroits particulièrement hostiles dont on se demande comment des êtres humains peuvent encore y trouver une raison de vivre. Entre la pierre et le ciel. Quelque part pas loin de la commune de Florac dans le département de la Lozère, lieu âpre et toujours synonyme d'exode. Dans une région appelée Cévennes. Ce n'est pas la peine que tu fasses le projet fou d'y aller un de ces quatre.

Abel, qui a refusé de quitter les lieux, lutte seul face à la montagne. En quête de l'eau salvatrice, il espère toujours. Mais en vain. Au dessus de lui tournoie inlassablement un épervier. Comme la métaphore de ce temps qui finit par avoir raison de toutes les volontés. Moi-même, je m'arrêterai peut-être un jour avant ma cinq cent millième chronique.

Et loin d'une vision de nature idyllique, Carrière montre un monde plutôt cruel et des pauvres gens capturés dans leur triste vérité. Ceci lui amena d'ailleurs et de façon plutôt ridicule la désapprobation des certains lecteurs Cévenols. Les cons.

"L'épervier de Maheux" - qu'il ne faut pas prendre pour un roman régionaliste -, brille par la qualité littéraire de son texte qui rappelle le meilleur de Giono. L'écriture y est riche et sensuelle. Les descriptions sont de haute volée. Le thème très noir et la vision de ce petit monde en décomposition sont traîtés de façon plutôt moderne dans un style des plus alertes rejoignant parfois le mode journalistique. A la fois détaché puis proche de ses personnages souvent mesquins, captant aisément la dimension tragique de son anti-héros, l'auteur nous prend à témoin et nous interpelle.

Jean Carrière, qui malheureusement nous a quittés récemment, avait réussi là un roman de très grande qualité. A la fois beau et fascinant.

Je te le conseille vivement.

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l'image du jour _____________________________________________________________________________

Jean-Claude se rendant compte soudain qu'il a pris dans la bibliothèque "L'épervier de Mathieu" au lieu de celui de Maheux !

Du coup, c'est sûr qu'il va être beaucoup moins aware.